Le bustier, entre contrainte et liberté

Associée aux grands bals hollywoodiens et autres soirées de gala où rivières de diamants et gants d’opéra étaient de mise, la robe bustier renvoie l’image d’une féminité absolue. Comment ne pas citer Marilyn Monroe en rose shocking dans Les hommes préfèrent les blondes (1953), Grace Kelly vêtue de blanc dans La Main au collet (1955) ou encore Audrey Hepburn en robe bustier rouge Givenchy dans Drôle de frimousse (1957) ?

C’est sur ce qui fait le sel de la féminité, vaste sujet, que s’est penchée l’écrivaine et féministe américaine Susan Brownmiller avec Femininity (non traduit, Ballantine Books, 1984). « La féminité, par essence, est un sentiment romantique, une tradition nostalgique de limitations imposées », notamment par le vêtement.

« Les vêtements féminins incitent le corps à se pavaner de manière discrète, mais ostentatoire, note-t-elle. [Ils] produisent des sons qui leur sont propres : le cliquetis saccadé des talons, le tintement musical des bracelets, le doux bruissement de la soie ou, à une époque révolue, le murmure des jupons, le claquement d’un éventail. »

Souvent, le bustier est corseté. Il colle au corps et contraint, voire sculpte, selon les canons en vigueur, grâce à une structure complexe. « La quête du corps parfait dans la robe parfaite se traduisait par la quête du corset parfait, capable de rehausser, d’augmenter ou d’aplatir la poitrine, d’élargir ou d’affiner les hanches, de pincer ou d’allonger la taille, de cambrer le dos, d’incliner les épaules et de rentrer le ventre, conformément à l’idéal de mode de l’époque », écrit ainsi Susan Brownmiller.

Très vite pourtant, le cinéma comme la pop culture en font un symbole d’affirmation : en bustier aux seins coniques Jean Paul Gaultier, Madonna rappelle dès les années 1990 que son corps est une force et pas juste un outil de séduction. Après elle suivront Beyoncé et Lady Gaga, souvent sanglées dans des bustiers de scène rutilants, transformés en véritables armures.

Héritier du corset mais débarrassé de sa fonction « disciplinaire », le bustier demeure un vêtement sur le fil, qui hésite entre contrainte et liberté. En cadrant le corps tout en l’exposant, il dit aussi quelque chose de notre époque, où la féminité se doit encore d’être une performance. Mais il incarne surtout le retour du tailoring, ce vêtement aux lignes nettes qui offre une structure à celle qui le porte. Car c’est bien dans sa version la plus minimale qu’il a marqué les podiums de l’automne-hiver 2025-2026, avec une préférence pour l’absence de bretelles.

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