Les ressources des organisations non gouvernementales (ONG) s’effondrent. Outre la suppression de l’agence américaine d’aide au développement décidée par Donald Trump dès le début de son second mandat, plusieurs bailleurs majeurs ont annoncé d’importantes coupes budgétaires. En 2024, selon les données de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), l’aide internationale publique a chuté de 7,1 % par rapport à 2023, première baisse après cinq années de hausse. A ce rythme-là, ce sont des pans entiers de la société civile indépendante qui risquent de disparaître.
En mars 2025, le jury d’un tribunal du Dakota du Nord condamnait Greenpeace à verser plusieurs centaines de millions de dollars pour diffamation à l’encontre de l’exploitant d’un oléoduc américain, mettant en péril la survie même de l’ONG environnementale aux Etats-Unis. Dès la sélection du jury, des liens avec l’industrie fossile avaient suscité de vives inquiétudes. La décision apparaît autant comme une sanction financière que comme un signal d’intimidation visant à décourager toute contestation.
En France, les procédures-bâillons, aussi appelées Slapp [acronyme de « Strategic Lawsuit Against Public Participation »], constituent aussi un enjeu majeur : notre pays concentre 10,6 % des cas recensés dans l’Union européenne (UE).
Les poursuites de TotalEnergies contre Greenpeace France, après un rapport sur ses émissions, illustrent l’usage détourné du droit pour museler le débat public.
L’affaire du Qatargate, plus grand scandale de corruption de l’UE, aurait pu conduire au renforcement des garde-fous institutionnels. Il n’en a rien été : faute de moyens réels, l’organe éthique est resté impuissant, tandis que certains responsables ont préféré détourner l’attention en faisant des ONG des boucs émissaires.
Début 2025, le tabloïd néerlandais De Telegraaf accusait la Commission européenne de financer un « lobbying de l’ombre » via les ONG, pour promouvoir le Green Deal. Bien que dénuée de preuves et réfutée par un rapport de la Cour des comptes européenne, cette thèse a été reprise par le Parti populaire européen (PPE), qui a d’abord mis en place un groupe de surveillance parlementaire avec l’appui de l’extrême droite, avant d’aller plus loin en collaborant avec un groupe fiscal proche de l’extrême droite pour déposer plusieurs plaintes pénales contre deux anciens commissaires, architectes du Green Deal, accusés d’avoir orchestré ce prétendu lobbying occulte.