Nan Goldin : « L’appareil photo m’a donné une voix, une façon de m’intégrer »

C’est dans une chambre d’hôtel en Camargue que Le Monde a rencontré, durant l’été, la photographe américaine mondialement connue, avant qu’elle ne reçoive le prix Women in Motion 2025 de Kering et des Rencontres d’Arles. Toute vêtue de noire, fumant cigarette sur cigarette, Nan Goldin, 72 ans, nous a raconté de sa voix rauque sa vie chaotique et les combats qui l’animent aujourd’hui.

… S’il n’y avait pas eu ma sœur. Elle m’a ouvert les yeux sur le monde. C’est elle qui m’a appris la révolte. Je ne serais pas là non plus si je n’avais pas eu une volonté d’acier. J’ai dû surmonter tellement de choses.

Oui. Je suis partie de chez moi quand j’avais 15 ans et mes amis m’ont donné une personnalité. Ils m’ont définie. C’est mon meilleur ami, [le photographe américain] David Armstrong [1954-2014], qui m’a prénommée Nan. Ils sont ma famille, même si beaucoup d’entre eux sont morts. J’ai un frère qui vit en Suède et son fils, mon neveu, est aujourd’hui l’une des personnes les plus importantes dans ma vie. A travers lui, je me suis reconnectée à ma famille de sang.

Mes grands-parents venaient de Pologne et de Roumanie, mais je ne les ai jamais connus. Mes parents sont nés aux Etats-Unis, ils étaient libéraux et appartenaient à la classe moyenne éduquée. Comme la plupart des familles américaines, ils étaient trop soucieux du qu’en-dira-t-on, de ce que pensent les voisins. C’est la maladie la plus répandue des banlieues américaines. Mes parents étaient juifs pratiquants. J’ai eu une éducation religieuse, mais j’ai arrêté d’aller à la synagogue quand j’avais 11 ans. J’ai préféré prendre des cours de poterie. Mon père était professeur. Il avait travaillé pour le gouvernement, puis il a enseigné l’économie. Ma mère était bibliothécaire. Nous vivions dans la banlieue de Boston [Massachusetts].

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